© Pierre Grosbois : Sandrine Bonnaire et Frédéric Leidgens dans L'Amante anglaise de Marguerite Duras, mise en scène de Jacques Osinski au Théâtre de l'Atelier Sandrine
© Christophe Raynaud de Lage : CONTRE d'après la vie
© DxO: Émilie Leriche et Martin Harriague avec l'Ensemble 0
© Fondation de Royaumont : Chant de la terre – Pour Mahler, Gustav Mahler – Joce Mienniel – Olivier Cadiot (Festival de Royaumont 2024)
Abritée dans un monastère cistercien, la Fondation de Royaumont (Goüin-Lang) pour le progrès des Sciences de l’Homme célèbre, cette année, ses soixante ans. Construite au XIIIème siècle au milieu des bois et des marais, sous l’égide de Saint-Louis qui en fit son lieu de retraite privilégié, l’abbaye est devenue au début du XXème siècle la propriété familiale de Jules Goüin, un grand industriel et un humaniste. Son petit-fils, Henry et son épouse, Isabel Lang, tous deux mélomanes, s’attacheront à la restaurer et en feront un lieu ouvert aux artistes et aux intellectuels (philosophes, sociologues, historiens…). Ils y organisent des concerts, des rencontres. Parmi leurs visiteurs : Nathalie Sarraute, Claude Simon, Michel Butor, Jacques Lacan Roland Barthes, Edgar Morin, Claude Lévi-Strauss, Jacques Monod, Jean Piaget et Noam Chomsky et bien d’autres.
Henry et Isabel Goüin créeront la Fondation de Royaumont en 1964. Par la suite, ils lui lègueront leur abbaye. Royaumont est ainsi la première fondation privée à vocation culturelle en France. Francis Maréchal en devient le directeur dès 1977. Et le restera jusqu’à la fin de cette année. La Fondation de Royaumont est membre de l’Association des Centres culturels de rencontre en France et en Europe (ACCR).
Depuis soixante ans, la Fondation de Royaumont accueille des résidences artistiques, organise des rencontres pluridisciplinaires, produit ou co-produit des créations musicales (commandes à Georges Aperghis, par exemple) et chorégraphiques. Avec ses cloîtres et ses bibliothèques, le lieu est propice à la recherche et à la réflexion. C’est aussi un lieu de vie avec ses jardins à la française, son potager.
Ancré dans son passé historique, Royaumont symbolise néanmoins la modernité et l’éclectisme. Et cela, depuis toujours. Il y eut, à l’abbaye, un concert de Pink Floyd en juin 1971. Royaumont, c’est aussi le renouveau de la musique baroque avec William Christie et les Arts Florissants. À l’instigation de Francis Maréchal, c’est encore l’ouverture à la poésie contemporaine et le soutien de la jeune création. La chorégraphie a pris une place de plus en plus importante avec Hervé Robbe, qui a été nommé directeur artistique du PRCC de Royaumont. Lui aussi favorise l’expérimentation et l’émergence de nouveaux talents avec le dispositif Prototype. Différentes générations s’y côtoient : Susan Buirge (en résidence à Royaumont depuis les années 2000) et Myriam Gourfink, par exemple…
La programmation du dernier festival (7 septembre – 6 octobre 2024) sous la direction de Francis Maréchal témoigne de cet éclectisme et de cette effervescence. Parmi les artistes invités, citons : François Chaignaud et Geoffroy Jourdain, Jocelyn Mienniel et Olivier Cadiot, Thomas Lebrun, Leïla Ka avec Maldonne (sa première chorégraphie de groupe), l’organiste Lucile Dollat, le claveciniste Francesco Corti, les Arts Florissants sous la direction de William Christie.
Le temps d’une journée passée à Royaumont, on aura pu entrevoir, dans le Réfectoire des Moines, quelques instants de répétition de In absentia de François Chaignaud et Geoffroy Jourdain (1). La création aura lieu le lendemain marquant à la fois l’ouverture du Festival de Royaumont et celle du Festival d’Automne. C’est un projet qu’ils portent depuis quatre ans avec des workshops espacés, à partir de tumulus, spectacle qui est né justement à Royaumont en août 2020. Pour François Chaignaud et Geoffrey Jourdain, In absentia n’est pas une adaptation de tumulus. Ils parlent plutôt d’une « bouture », « d’une extension d’une pratique en tenant compte de l’espace ». À Royaumont, le spectacle a été répété et s’est donné l’après-midi. La lumière du jour traversait les vitraux du Réfectoire des Moines, créant une ambiance particulière. Ce sont quarante minutes intenses, entre un « concert spirituel » et une performance polyphonique, au rythme de musiques sacrées de la Renaissance. Les treize chanteurs/performeurs forment un chœur, vocal et physique, au plus près des spectateurs. « Il ne faut pas que la musique soit désincarnée » a expliqué François Chaignaud.
© Fondation de Royaumont : Chant de la terre – Pour Mahler, Gustav Mahler – Joce Mienniel – Olivier Cadiot (Festival de Royaumont 2024)