© Pascale Lebeau. Adeline Piketty et Guy Vouillot dans Elle et Il de Adeline Piketty, mise en scène de Laurence Campet
Un Festival à Villerville 2019: L’Édition florilège
Par Chantal Boiron
Chaque été, depuis maintenant six ans, le petit village de Villerville sur la Côte Fleurie en Normandie se transforme en scène de théâtre. Des artistes s’y installent deux ou trois semaines pour répéter leurs prochains spectacles que les villageois et les festivaliers découvriront le dernier week end d’août.
Certains de ces artistes sont déjà connus. D’autres, souvent plus jeunes, le sont beaucoup moins. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs réalisé à Villerville leurs premières expériences théâtrales. Ainsi, on a eu la chance de découvrir les travaux, les maquettes d’étudiants très prometteurs du Jeune Théâtre National, tout juste sortis du Conservatoire national supérieur d’Art Dramatique de Paris ou de l’École supérieure d’art dramatique du Théâtre national de Strasbourg. Certaines compagnies viennent jouer à Villerville des spectacles qu’elles ont déjà créés. D’autres en feront ici la création. Pour tous ces artistes, Villerville est devenu un endroit à part où l’on peut « oser » un geste artistique en toute liberté.
Depuis six ans, des liens très forts se sont tissés entre eux et les Villervillais qui les hébergent. Chaque lieu de représentation, que ce soit le Garage, derrière l’hôtel Bellevue, le Château et sa Ferme Bio, le Chalet avec ses fenêtres ouvrant sur la Manche et ses magnifiques couchers de soleil, a un lien avec l’histoire quotidienne du village. La distance qui sépare les différents lieux n’est jamais très longue et, pour le plus grand bonheur du festivalier, tout se fait à pied, en longeant la plage de sable, peinte autrefois par Eugène Boudin, en empruntant les ruelles pittoresques du village, en traversant la petite place où il y a toujours le Cabaret Normand d’Un singe en hiver, en marchant à travers des prairies d’où l’on aperçoit la mer.
Bref, à la fin de l’été, Un Festival à Villerville est un moment privilégié aussi bien pour les Villervillais que pour les « théâtreux » les plus exigeants, un moment de découvertes et de rencontres, un moment d’échanges et de partage.
De la fondation du festival à sa transmission
À l’initiative de ce beau projet, qui fait désormais partie de la vie du village et de ses habitants, il y a Alain Desnot. Un homme discret (sans doute trop discret), peu connu du grand public mais qui, pourtant, œuvre dans le théâtre depuis de longues années. Alain Desnot connaît parfaitement le milieu théâtral et il a su en faire bénéficier le festival de Villerville en invitant des artistes de talent, en instaurant un partenariat solide avec le JTN, en faisant venir des journalistes pour apporter au festival une notoriété nationale, en mettant en place un début de mécénat, en se battant pour obtenir quelques subventions (Département, Région..) et donner ainsi à cette aventure encore fragile les moyens de perdurer.
En créant Un Festival à Villerville, avec la complicité de Sylvaine de Keyzer, conseillère municipale, l’objectif d’Alain Desnot était d’ancrer le festival dans son territoire, de contribuer ainsi à une nouvelle forme de décentralisation et, surtout, de « créer du désir » (voir UBU n°62/63. Ayant atteint son objectif, Alain Desnot a décidé d’arrêter. Cette sixième édition sera « sa dernière »: « C’est le bon moment de passer la main. J’ai fait un peu le tour de ce que je voulais faire. Si je continuais, je finirais par me plagier un peu moi-même. Et puis, il faut de l’énergie.»
Un Festival à Villerville continuera donc sans lui. C’est Matéo Cichacki qui va reprendre le témoin : un jeune acteur/metteur en scène de 22 ans, qui a des attaches à Villerville, « pour que cela ait du sens » ajoute Alain Desnot.
Pour sa dernière édition en tant que directeur artistique, il a choisi de réunir des artistes qui sont déjà venus à Villerville lors de précédentes éditions et qui ont marqué le festival : une édition « florilège » qui nous raconte que le festival de Villerville, c’est « créer du désir » certes, mais que ce sont aussi des histoires de fidélité : un désir qui se prolonge. Quand Alain Desnot en a parlé à Adeline Piketty, à Gina Calinoiou, à Lionel González, à Thibault Perriard, à Hervé Briaux, à Raphaël Defour, à Renaud Triffaut et aux autres, tous lui ont dit : « oui ». Et, tous sont de retour à Villerville, avec de nouveaux spectacles. On en reparlera.
Un Festival à Villerville, 6ème édition (29 août -1er septembre 2019) https://www.unfestivalavillerville.com